Barbara, ou des souvenirs trop badants

25 septembre 2019

La langue française est un havre de poésie. Même quand on s’applique à utiliser les mots qui ne figurent pas encore au dictionnaire. Madame Rochefort a l’âme rêveuse et engagée : elle scande son interprétation de Barbara, de Jacques Prévert :

Notre cher Jacques Vertpré  a le seum. Il traine ses basks de gros déprimé dans les streets de Brest. Avec sa garette dans la bouche, il se balade sous la pluie, parce que toi-même tu sais, ça pisse tout le temps en Bretagne. Il trace sa route, et il se rappelle d’un moment de sa life.

« Le poète a eu la trique en voyant Barbara »

C’était avant la guerre. C’était un jour un peu pareil qu’aujourd’hui, il pleuvait la race, Jacques Vertpré trainait son cul dans la rue, quand tout à coup, il a vu une petite bombasse, toute pimpée et tout et tout. La meuf avait le smile, elle était trop fraiche. Son blaze, Jacques Vertpré l’a sans doute inventé : il l’a baptisée Barbara. Notre cher poète déprimé a presque eu la trique en voyant Barbara. En tout cas, d’un coup, le seum s’est envolé, ça je te le dis  ! Mais bon, pas de chance pour Vertpré : ce jour-là, la go rejoignait un keum qu’elle avait l’air de bien kiffer. Elle a couru dans les bras du gars, ils se sont roulé une de ces galoches, et puis ils ont marché, ils étaient biens, ils étaient refaits, même s’il faisait un temps de merde. Notre cher Jacques Vertpré, même pas jaloux, était plutôt  tout ému de voir ça, ça lui a donné les yeux tout mouillés. C’est un poète le gars, une vraie couille molle, mais il n’y peut rien, son cœur a fondu ce jour-là et il a eu le smile en voyant Barbara pécho un BG dans la rue toute mouillée de pluie.

« Il déprime grave car la guerre est passée par là »

Aujourd’hui, Jacques Verpré refait le même chemin dans Brest, mais il déprime grave parce qu’entre temps, la guerre est passée par là. Il se demande ce que cette jolie go là, qu’est-ce que sa Barbara a bien pu devenir après que les zing ont tout déglingué dans la ville. Est-ce qu’elle est encore vivante ? Et son keum le beau gosse, est-ce qu’il a dû partir se fighter sur le front, est-ce qu’il a clamsé ? Ou bien est-ce qu’il a pu revenir de la guerre, pécho Barbara et lui faire plein de petits chiards ? Est-ce qu’au final, ils ont pu s’installer tranquilles dans un meublé ?

« Barbara lui fout le seum »

Ouais, Jacques Vertpré marche dans Brest et se retrouve  en pleine dépression. Sa balade ne lui fait pas du tout du bien en fait.  La pluie lui fout le seum, la guerre lui fout le seum, Brest lui fout le seum, Barbara lui fout le seum… et surtout, ses souvenirs lui foutent le seum… on se demande même si le gars ne va pas se tirer une balle tellement il est mal… mais non, il tire une dernière latte sur sa clope, et regarde les nuages flotter au-dessus de la mer. C’est vraiment pas la joie, mais bon,  tout ça, ça a le mérite de l’inspirer : toi-même tu sais bro, les poètes sont tous des gros adeptes du bad trip.