Félicien LiA est « Au bout des larmes »

1 mai 2020

L’artiste publie un nouvel EP

Un peu plus d’une année après la sortie de l’album Des feux des fous, Félicien LiA livre Au bout des larmes. Un EP cinq titres écrit en milieu d’année passée, qui était censé être le point de départ d’une nouvelle tournée. Au bout des larmes sera plutôt le disque du confinement, pour accompagner nos journées patientes et posées.

Interview

GRRIF : Tu fais quoi en ce moment ?

Félicien LiA : Je lis Andrée Chedid, j’écoute du Bud Powel, je fais la promo de mon nouvel EP et je compose avec mon pote Samy dans mon local, à 300 mètres de chez moi.

Tu sors ton nouvel EP une année après la sortie de ton album Des feux des fous. C’est un hasard?

Oui ! J’avais enregistré Des feux des fous avec toute une bande et ensuite, j’ai monté un groupe avec d’autres personnes pour la scène. Comme la tournée se passait merveilleusement bien, je voulais enregistrer rapidement avec les musiciens de ce groupe. L’EP est né de l’envie de profiter d’une belle synergie pour continuer à créer et diffuser.

Toutes les chansons ont été écrites et composées dans mon local à Genève, entre l’été et l’automne dernier, à l’exception de la chanson Moulin Fantôme, que je taille depuis quelques années.

« Mon exploration artistique évolue, mes goûts aussi »

Ces morceaux ont ensuite pas mal voyagé. L’EP a été mixé en Floride, puis masterisé en Suède. Comment tu le vis aujourd’hui cet EP « voyageur » ?

Ce voyage entre Genève, la Floride et la Suède s’est fait par mail. Je profite de notre époque connectée pour faire des échanges internationaux. C’est aussi l’idée de s’éloigner d’une esthétique « chanson » en travaillant avec des gens qui ne comprennent pas les paroles et qui, de ce fait, sont plus sensibles aux mélodies.

On sent que depuis ton dernier album, ta musique a pris un tournant…

Mon exploration artistique évolue, mes goûts aussi. Ma fréquentation avec la scène genevoise, où j’habite depuis quelques années, et son mélange de groove et de rock seventies y est sûrement pour quelque chose. Aussi, un des grands changements, c’est ma manière de chanter. La remise en question des mimétismes que je reproduisais depuis des années est, en partie, due à un travail et divers échanges avec le musicien Robin Girod, qui a produit l’album.

« Tout est à l’arrêt, on est tous dans le flou, en attente »

Tu as beaucoup tourné l’année passée avec 40 dates de concerts. J’imagine que tu pensais continuer sur cette lancée. Est-ce que tu arrives à te projeter dans l’avenir ?

Oui, je me réjouissais de présenter ce nouvel EP sur scène ! Mais tout a été annulé ce printemps et les concerts commencent également à tomber cet été. On espère sincèrement que l’automne tiendra le coup. Tout est à l’arrêt, on est tous dans le flou, en attente. On n’est pas dans un période évidente pour la planification des projets…

C’est ta sœur, Chloé Donzé, qui a réalisée la pochette illustrée de l’EP. C’est la première fois que tu collabores avec ta sœur? 

Ma sœur est graphiste, établie à Munich. Elle a toujours réalisé les pochettes de mes albums! Si j’ai été plus tatillon (pour ne pas dire pénible) pour Des feux des fous, je lui ai laissé une carte blanche pour l’EP et le résultat est sublime! On a fait imprimer des pochettes en cartons pour les K7 et des stickers, c’est superbe!

Y a quoi au bout des larmes?

C’est à l’auditeur de le définir… Mais pour répondre, j’ai bien envi de vous partager le  poème Enivrez-vous de Baudelaire:

Il faut être toujours ivre. Tout est là : c’est l’unique question. Pour ne pas sentir l’horrible fardeau du Temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve. 

Mais de quoi ? De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. Mais enivrez-vous.

Et si quelquefois, sur les marches d’un palais, sur l’herbe verte d’un fossé, dans la solitude morne de votre chambre, vous vous réveillez, l’ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l’étoile, à l’oiseau, à l’horloge, à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est ; et le vent, la vague, l’étoile, l’oiseau, l’horloge, vous répondront : «Il est l’heure de s’enivrer! Pour n’être pas les esclaves martyrisés du Temps, enivrez-vous ; enivrez-vous sans cesse ! De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise.

Magnifique, n’est-ce pas?

Crédits Image : Mehdi Benkler